Sucre salé

10 février, je (Romain) quitte La Paz pour aller à Sucre. Un bus de nuit semi-cama (une moitié de lit, littéralement) d’environ 14 heures pour 135 Bolivianos (15 euros) dans des conditions un peu rudes. Je suis le seul étranger à bord, le bus n’est pas tout récent, il fait des arrêts fréquents et les locaux sont un peu bruyants… les écouteurs ne sont pas encore arrivés jusqu’en Bolivie a priori.

J’arrive à Sucre le lendemain matin vers 10 heures et en tant que bon radin, je vais marcher jusqu’à Traveler’s Guesthouse, située en face du Parque Bolivar à une grosse demi-heure de marche de la gare routière. En attendant le check-in, je profite de la vue :

L’auberge est sympa et dans les moins chères de Sucre. Il n’y a pas affluence et je vais me retrouver tout seul dans le dortoir de 6 personnes.

Sucre est la capitale constitutionnelle du pays, elle est surnommée la cité blanche (ciudad blanca) en raison de son centre historique fondé à partir de 1538 recouvert de blanches églises. C’est une ville à taille humaine où il est agréable de se promener.

Je pars ensuite visiter le centre historique :

La Plaza 25 de Mayo, principal square de la ville situé en son cœur :

Les jardiniers ont bien bossé !

Puis un petit tour au marché local pour se mettre en appétit :

Et je ressors avec mon menu du jour, constitué de pain, fromage et banane.

Magnifique sandwich que je déguste au Parque Bolivar :

Il fait beau, il y a du soleil et c’est agréable de ne pas avoir froid dès qu’il y a de l’ombre, merci au fait que nous ne sommes seulement qu’à 2750 mètres au dessus du niveau de la mer.

La visite continue par les « must-see » de la ville, c’est-à-dire des églises qui sont, malheureusement, quasiment toutes fermées.

J’en profite pour parfaire ma connaissance de l’histoire de Bretagne en bouquinant sur la place principale, ce qui m’offre le privilège de me faire quelques amis : un gamin cireur de chaussures un peu collant, un vendeur de cartes qui deviendra mon pote et un estropié – borgne qui cherche des étudiants en médecine pour l’opérer, que du rêve !

Le soir devant l’auberge, c’est la fiesta. La fanfare locale donne des répétitions, ça s’annonce prometteur !

Le lendemain, je pars visiter l’église San Francisco qui fut édifiée en 1581 :

Puis entre 2 averses, je prends mon courage à deux mains et je m’attaque au point de vue de la Recoleta qui comme tout bon point de vue se situe sur les hauteurs de la ville.

Ça grimpe.

La Recoleta construite en 1600 par les franciscains. Et le point de vue sur la ville, qui n’est au final pas terrible :

L’après-midi, je me lance dans la visite du musée universitaire Charcas qui est censé être un des meilleurs musée du pays mais malheureusement une grande partie est fermée, évidemment la plus intéressante. Fort heureusement, il reste les momies :

Ce qui est un peu plus attrayant que les silex :

Le soir en faisant un tour dans le Parque Bolivar, j’ai la chance de tomber sur un magnifique spectacle son et lumières qui a pour décor les fontaines du parc :

Pendant que je dors tranquillement, Jez se fait un bon petit thé lors d’une pause de son bus à 2 heures du matin :

Il osera même venir me réveiller le lendemain matin à 10 heures lorsqu’il arrivera !

En tant qu’habitué des lieux (les sdf de la place principale sont mes amis), je fais visiter les principaux points d’intérêt à Jez qui se console dans les églises suite à son échec de l’ascension du Huayna Potosi (pour ceux qui auraient raté ce magnifique périple, vous pouvez cliquer ici).

C’est la rentrée universitaire, nous retrouvons notre jeunesse et nous nous infiltrons parmi les étudiants pour visiter la faculté de droit de Sucre, hautement recommandée par Le Routard.

On retourne ensuite visiter le marché local, où nous dégusterons de très bons jus de fruits pour une somme dérisoire :

C’est également l’occasion de se rendre compte de la pauvreté de certains habitants de ce pays, car des mendiants viennent nous harceler à peu près toutes les 10 secondes.

Comme souvent, notre œil avisé a repéré un petit restaurant de quartier répondant au doux nom de La Pâtisserie qui propose la plus fine gastronomie française, c’est à dire des galettes :

Un peu fade, mais pas si mal pour des galettes Boliviennes, surtout vu les prix affichés (environ 2,5€ la complète).

Le 14 février, de bon matin, nous nous dirigeons vers la station de bus pour aller à Potosi, le petit déjeuner est à base d’empanada, petit chausson souvent fourré de viande ou de fromage (hmm, c’est trop bon les empanada) :

4 heures de bus nous attendent pour aller à Potosi, mais la première heure sera égayée par un interminable speech d’un pseudo passager qui au début parlera nutrition pour finalement essayer de vendre des pilules magiques à tout le bus, ce qu’il réussira plutôt bien. Merci aux nombreux pigeons qui voyagent avec nous !

Nous arrivons à Potosi vers 14 heures dans un terminal de bus qui ressemble plus à une soucoupe volante désaffectée qu’autre chose.

Potosi est la ville de plus de 100 000 habitants la plus haute au monde avec une altitude de 4090 mètres ce qui fait que nous allons essayer d’éviter les efforts physiques et privilégier les bars d’autant plus qu’il ne fait pas chaud à cette altitude. Cette cité coloniale est classée au patrimoine mondial de l’Unesco car elle fut bâtie grâce à la mine du Cerro Rico ce qui, dans le passé, lui a permis de se développer et d’être une des trois villes les plus riches au monde au XVIIème siècle.

Nous rejoignons le centre-ville en combi et installons nos affaires à l’auberge Koala Den, recommandée par Le Routard et un collègue à Romain. Cette auberge est gérée de main maître par Maria, gentille propriétaire qui est débordée de 6 heures du matin (à préparer le petit déjeuner) à minuit (à essayer de faire taire les gens éméchés qui squattent le hall). Pour 50 bolivianos, nous avons une bonne auberge, avec du chauffage, de l’eau chaude, du wifi et un bon petit dej.

Le temps est à la pluie, mais nous prenons notre courage à deux mains et partons visiter le centre-ville :

C’est la Saint Valentin et notre ami le curé croise la bonne sœur. Pourquoi font-ils semblant de s’ignorer ?

La Plaza 10 de noviembre :

Nous allons ensuite fêter dignement la Saint Valentin avec 2 belles blondes…

Le lendemain, nous partons à la visite des mines de la terrifiante colline du Cerro Rico. Nous avons réservé un tour avec notre auberge pour 100 bolivianos par personne (environ un peu plus de 10€).

L’économie de Potosi est donc quasi-exclusivement tournée vers le revenu issu de l’extraction minière du Cerro Rico. Cette immense montagne située en bordure de la ville est composée d’environ 200 mines d’une profondeur maximale de 450 mètres que 15 000 mineurs exploitent toujours dans des conditions proches du Moyen-Age.

La visite commence par le marché des mineurs où l’on peut acheter tout le matériel nécessaire pour une « bonne » journée à la mine. Notamment casque, lumière, feuilles de coca, alcool à 96° (pour boire !) et chose encore plus improbable, de la dynamite et son détonateur. Nous sommes fortement incités à acheter un de ces produits pour les offrir ensuite aux mineurs qui risquent leur vie dans des conditions épouvantables.

C’est de la dynamite ! (à prononcer avec l’accent Suisse)

Ensuite, nous prenons le bus pour aller à la station d’extraction des minerais. Ce ne sont pas les conditions de travail de l’intérieur de la mine mais ce n’est pas l’extase non plus : il fait chaud, c’est bruyant, on y manipule des produits chimiques et l’équipement est plutôt rudimentaire. Une fois les blocs de roche extraits il est nécessaire, par un processus chimique, d’y extraire les éventuels minerais (argent et étain principalement).

Point de vue sur la montagne Cerro Rico qui a perdu 300 mètres de hauteur depuis le début de son exploitation il y a environ 500 ans.

L’heure est arrivée de s’engouffrer dans « le monstre », la tâche s’annonce rude. Il fait souvent très chaud, les conduits sont très étroits et il faut souvent ramper.

L’entrée dans la mine.

Le début du tunnel est assez haut, mais ça va rapidement se compliquer pour aller rendre visite à « El Tio », dieu du monde souterrain à qui l’on doit offrir alcool, clopes, coca pour qu’il offre sa protection aux mineurs.

Nous descendons ensuite plus profondément dans la mine pour aller explorer les galeries et voir où les mineurs creusent. Il faut signaler qu’aujourd’hui est un jour férié pour les mineurs, c’est leur carnaval, nous visitons donc une mine déserte. Il est très difficile de respirer car nous sommes à plus de 4 000 mètres d’altitude, les conduits sont très étroits et il y a beaucoup de particules en suspension. De plus, il fait environ 35°, c’est une vraie épreuve comme vous pouvez le voir ci-dessous :

Par moments, nous avons l’impression de manquer d’air et de ne plus pouvoir respirer, claustrophobes s’abstenir !

Pour progresser entre les différents niveaux de la mine, c’est vraiment compliqué car nous sommes dans des espèces de gouttières qui descendent abruptes et le sol se dérobe sous nos pieds.

Pendant que nous cheminons dans ces galeries désaffectées, nous prenons conscience de l’horreur que vivent chaque jour les mineurs. Il faut s’imaginer que certains passent 24 heures d’affilée dans ces conduits qui sont le dernier endroit sur terre où l’on a envie d’être.

Ci-dessous, une petite vidéo faîte avec les moyens du bord dans des conditions difficiles qui illustre nos 2 heures passées sous terre :

Nous ressortons épuisés de cette épreuve :

Pendant que nous nous échinions, le chat de l’auberge a donné tout ce qu’il avait en tant que digne représentant de son espèce :

Nous irons ensuite reprendre des forces avec Danny, un anglais avec qui nous étions dans la mine, en mangeant des gros burgers.

Dans notre chambre à l’auberge nous sommes avec un groupe de français étudiant à Buenos Aires que nous avions déjà rencontré à Arequipa, au Machu Picchu et à La Paz. La coïncidence étant trop forte nous irons donc déguster avec eux des chocolats chauds composés uniquement de chocolat, c’est bourratif mais délicieux ! Nous passerons également la soirée en leur compagnie à l’auberge où nous nous initierons à l’alcool local, le Fernet. C’est (relativement) dégueulasse mais diablement efficace.

Courageux, nous nous levons à 8 heures le dimanche matin car notre côté professionnel nous rattrape. En effet, nous devons visiter la Casa de la Moneda qui a la bonne idée de n’être ouverte qu’entre 9 heures et 10 heures 30. C’est un indispensable de la ville car c’est ici qu’on frappait autrefois la monnaie et il reste beaucoup de témoignages de cette époque révolue. Potosi a été choisie par les espagnols en raison de son immense gisement d’argent et alimentait toutes les régions avoisinantes ainsi que l’Europe.

La visite guidée (obligatoire) est en français et nous revivons au fil des pas l’histoire de cette emblématique demeure. C’est très instructif, nous apprenons par exemple que le sigle de Potosi a inspiré le $ américain.

C’est sur cette impressionnante machine, tirée par des chevaux en sous-sol, qu’étaient aplatis, en lamelles, les blocs d’argent qui allaient ensuite être poinçonnées. Les conditions de travail difficiles et l’altitude ne donnaient que quelques mois d’espérance de vie aux chevaux.

Le coffre-fort magique grâce à ses multiples serrures était quasiment inviolable.

Le poinçonnage était fait par deux hommes qui frappaient les pièces une à une, un travail de titan.

Le Dakar est récemment passé pour la première fois en Bolivie et ça se voit ! Il y a des statues, des affiches, des stickers partout. Les boliviens semblent fiers que cette épreuve passe dans leur pays.

En sortant, nous tombons en plein carnaval des mineurs. Pendant 3 jours, la ville est en fête et rend hommage à ses héros qui ont pendant ce temps déserté les hauteurs de la ville. Le principe du carnaval est plutôt atypique et stupide car il s’agit d’arroser à l’aide de mousse ou de bombes à eau les participants et spectateurs. Néanmoins, nous avons la chance de pouvoir assister à ce défilé riche en couleurs :

Les habitants sont déguisés dans divers costumes pour l’occasion, les mineurs défilent en tenue de travail et l’ambiance musicale est donnée par plusieurs fanfares.

Nous nous prenons plusieurs bombes à eau dans la figure, c’est un peu Bagdad par moments.

On ose même s’attaquer à un pauvre panda sans défense :

Un petit aperçu de l’ambiance avec mamie qui enflamme le dancefloor :

Toute la ville a fait le déplacement pour cette parade qui va durer des heures.

Le déjeuner se fera en compagnie d’un couple de néerlandais très sympathiques à qui nous feront découvrir la gastronomie française dans un restaurant disposant d’un très bon rapport qualité / prix.

Notre passage à Potosi touche à sa fin et nous n’avons pas été épargnés par les nombreuses et violentes averses qui traversent la ville.

Lundi matin, 17 février 2014, départ de l’auberge en taxi à 7 heures pour se rendre à la gare routière où les « crieurs » des compagnies de bus sont déjà à l’oeuvre dans ce terminal désert. Comme d’habitude, nous partirons avec du retard en direction de Tupiza, ville située à environ 5 heures de bus.

Là bas, Clara nous rejoindra et c’est tous les 3 que nous partirons à la découverte du magnifique Sud-Lipez.

Pour voir toutes les photos de Sucre et Potosi, vous pouvez cliquer sur ce lien.

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